25.1.11

PORTÉE SPIRITUELLE DE L'ART SACRÉ



Vierge du Signe, 17°s.


La théologie occidentale a, dès ses origines, manifesté une certaine indifférence dogmatique à la portée spirituelle de l'art sacré, à cette iconographie qui malgré son long martyrologe est tellement vénérée en Orient. Toutefois, providentiellement, l'art occidental fut en retard sur la pensée théologique et jusqu'au 12e siècle il demeure fidèle à la tradition commune tant en Orient qu'en Occident. Cette tradition unique vit pleinement dans le magnifique art roman, dans le miracle de la cathédrale de Chartres, dans la peinture italienne qui cultive encore la "maniera bizantina".
Mais à partir du 13e siècle la facticité optique, la perspective, la profondeur, le jeu du clair-obscur, le trompe-l'œil sont introduits. Si l'art devient plus raffiné, il est moins porté à la saisie directe du transcendant. En rompant avec les canons de la tradition, l'art n'est plus intégré au mystère liturgique. De plus en plus autonome et subjectif, il quitte sa «biosphère» céleste. Les vêtements des saints ne font plus sentir sous leurs plis les "corps spirituels" et même les anges apparaissent comme des êtres faits de chair et de sang. Les personnages sacrés se comportent exactement comme tout le monde, sont habillés et placés dans l'ambiance contemporaine à l'artiste. Encore un pas et le récit biblique, l'événement miraculeux n'est plus qu'une occasion pour exécuter savamment un portrait, une anatomie, un paysage.

Paul Evdokimov, 1901-1970, théologien orthodoxe
in "L'art Moderne ou la Sophia Désaffectée" en ligne

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