Composition de l'Icône de la Trinité 14°s., Andreï Roublev, Russie |
Regardons maintenant l’icône dans son ensemble, telle que Roublev l’a créée. Les trois personnages entrent à l’intérieur d’un cercle, dont le centre est la main du personnage du milieu. Le cercle a toujours été un symbole de sainteté et d’éternité. On ne sait pas où commence le cercle, ni où il finit, ce qui fait sa réalité propre. Et cette éternité est très liée à la sainteté qui est une plénitude absolue. Dieu est le Trois Fois Saint. Le Trisagion est une vieille prière juive: « Saint Dieu, Saint Fort, Saint Immortel, aie pitié de nous ». Cette sainteté est répétée trois fois pour montrer son absolu, son éternité, sa plénitude.
Les trois personnages de l’icône ont exactement le même visage, un exploit au niveau artistique. Les visages sont identiques parce que les trois Personnes de la Trinité sont identiques dans leur nature ; elles sont différentes dans leurs rôles, mais dans le rôle de chacun les deux autres Personnes sont présentes parce que l’action trinitaire se fait toujours à trois. Il n’y a pas de décalage dans le temps entre le Père et le Fils qu’il engendre et l’Esprit qui procède de lui. Il n’y pas de hiérarchie entre les trois Personnes, mais dans notre langage et par rapport à la création, nous pouvons dire que « le Père est un peu plus Créateur que les deux autres », que « le Fils est un peu plus Sauveur que les deux autres », que « le Saint Esprit est un peu plus Sanctificateur que les deux autres ». Nous donnons à chacun un rôle distinct, où cependant tous sont actifs et présents.
Les personnages du centre et de droite regardent vers celui de gauche, qui se tient plus droit que les deux autres, parce que le Père est l’origine, il est le Principe de tout ; c’est son rôle paternel. Les deux autres s’inclinent vers lui parce qu’ils acceptent déjà une mission qu’ils reçoivent du Père.
On reconnaît davantage le personnage du centre comme étant le Fils par l’opacité de ses vêtements, par sa manière d’être habillé. On représente toujours le Christ Pantocrator, le Christ glorieux, habillé d’une robe rouge et d’un manteau bleu. Il porte un tissu doré à l’épaule droite, signe impérial dans l’empire Byzantin. Par le visage, il ne s’agit pas de Jésus de Nazareth glorifié, car ce dernier était barbu, mais du Fils éternel de Dieu, avant même le mystère de l’Incarnation dans le temps et dans l’espace, mais par le vêtement il l’est déjà.
Un autre détail intéressant est l’inclinaison de la tête du personnage du centre, qui correspond à l’inclinaison de la tête du Christ sur les icônes de la Crucifixion.
Les deux autres personnages ont des vêtements plus transparents, plus légers ; ils sont plus « angéliques », parce que ces personnages ne se sont jamais manifestés dans la chair : le Père et l’Esprit. Les ailes nous rappellent leur nature spirituelle. Il ne s’agit pas de corps matérialisés. Nous pouvons dire « comme des anges », mais ils ne sont pas des anges, esprits créés ; parlons plutôt de réalités ou de substances spirituelles, car Dieu est esprit; l’Esprit pur de Dieu, la réalité divine, est intrinsèque et éternel.
L'hiéromoine Cyrille (Bradette)
Monastère Lepavinat, du patriarcat de Serbie
in "L'icône de la Trinité d'Andreï Roublev", en ligne
Monastère Lepavinat, du patriarcat de Serbie
in "L'icône de la Trinité d'Andreï Roublev", en ligne
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