17.1.12

AVANT ET APRÈS LE FIAT DIVIN



Pentecôte


L'Église-institution ne s'oppose pas à l'Église-événement, mais l'une suppose l'autre comme la grâce suppose notre effort personnel pour être efficace: depuis le temps des Pères, l'Église a toujours tenu à la doctrine de la collaboration entre la grâce divine et l'acte libre de l'homme dans la voie vers Dieu. Tous, nous sommes saints par la grâce, mais il s'agit de le devenir dans nos actes et dans notre vie entière.
La transcendance de Dieu est une conséquence du récit biblique de la création ex nihilo. Le monde n'est pas l'émanation du divin ou le reflet d'une réalité préexistante ou encore l'extension du divin. Il appelle ce qui n'existait pas comme ce qui existe Rm. 4, 17. Le monde n'existait pas avant le fiat divin et il a commencé à exister en donnant ainsi naissance au "temps". Cela signifie que nous appartenons à un ordre d'existence essentiellement différent de Dieu, à l'ordre naturel existant par la seule volonté de Dieu. Entre Dieu et l'ordre créé il n'y a pas d'interdépendance, il n'y  a qu'une dépendance totale de la créature par rapport au Créateur.
Les créatures peuvent se connaître entre elles, mais lorsqu'elles se tournent vers Dieu, elles sont comme écrasées par leur dépendance totale et, en fait, par leur inexistence.  Elles ne peuvent qu'affirmer que Dieu n'est  assimilable à aucune créature, qu'aucune image ni aucun mot ne peuvent exprimer son Être. (cf. Grégoire de Nysse)
Inconnu dans son essence, Dieu s'est pourtant révélé comme Père, Fils et Saint-Esprit: le Fils est devenu homme, et l'Esprit est descendu sur l'Église. Le Dieu chrétien n'est pas le Dieu inconnu des philosophes, mais un Dieu vivant qui se révèle et qui agit. L'Ancien Testament relate déjà l'action divine continue dans l'histoire du peuple élu, mais la Révélation chrétienne nous conduit à une plénitude: le Fils de Dieu s'anéantit lui-même, prenant la condition d'esclave et devenant semblable aux hommes... Ph. 2, 7-8. Il s'agit maintenant d'accepter le salut qu'il nous accorde, d'assimiler la vie divine par notre agrégation au Corps du Christ, mais aussi par l'onction que l'Esprit pose sur chacun de nous, au long des siècles de l'histoire qui s'étendent de l'Ascension à la Parousie, dans une seule et même humanité déifiée de Jésus-Christ.
Dieu a envoyé dans nos coeurs l'Esprit de son Fils qui crie: Abba, Père! Ga. 4, 6

Jean Meyendorff, 1926-1992,prêtre orthodoxe
Professeur au St Vladimir's Seminary, New York
in L'Église orthodoxe hier et aujourd'hui, éd. Seuil

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