6.3.12

RACINE DU SCHISME DE 1054




Pour l'Orient, l'Église était avant tout une communauté où Dieu était présent sacramentellement: le sacrifice est, en effet, le mode par lequel la mort et la résurrection du Seigneur sont à commémorer et par lequel sa seconde Venue est annoncée et anticipée. Or, la plénitude de cette réalité - donc aussi la plénitude de la vérité et la plénitude du magistère - se trouve présente dans chaque église locale, dans chaque communauté chrétienne réunie autour de la table eucharistique et ayant à sa tête un évêque, successeur de Pierre et des autres Apôtres. La fonction qu'il occupe suppose qu'il enseigne conformément à la prédication commune du collège apostolique dont Pierre fut le porte-parole, qu'il occupe à la table eucharistique la place même du Seigneur, qu'il est, comme l'écrivait au 1er siècle saint Ignace d'Antioche, "l'image de Dieu" dans la communauté dont il est le chef. Ces fonctions épiscopales sont essentiellement les mêmes à Rome, à Constantinople ou à Moscou, à toutes Dieu donne la plénitude. On voit ainsi où se trouve la racine même du schisme entre l'Orient et l'Occident. 
Jean-Paul II 
et l'archevêque de Serbie

En Occident, la papauté, à l'issue du long développement qu'elle a subi au cours des âges, possède à la fois, cpnformément aux définitions de 1870, une infaillibilité doctrinale et une juridiction "immédiate" sur tous les fidèles. L'évêque de Rome est donc le critère visible de la vérité et le chef unique de l'Église universelle, sans toutefois posséder de pouvoirs sacramentels différents de ceux des autres évêques.
Dans l'Église orthodoxe, aucun pouvoir de droit divin ne saurait exister en dehors et au-dessus de la communauté eucharistique locale constituée par ce qu l'on appelle aujourd'hui un "diocèse".

Jean Meyendorff, prêtre orthodoxe français, 1926-1992
Professeur au St Vladimir's Seminary, New York
in L'Église orthodoxe hier et aujourd'hui, éd. Seuil

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