31.8.12

LA LITURGIE, INITIATION À LA BEAUTÉ





L'humanité est appelée à la divinité. Cela veut dire non pas sacrifier son humanité, mais la part de soi qui vit sans Dieu, afin de vivre une totalité inouïe, celle du rassemblement de la vie, de la terre jusqu'au ciel, de l'humain jusqu'au divin. Le beau n'est pas là pour flatter esthétiquement le goût des hommes. Il est là pour apporter une connaissance ontologique vivante, en faisant se rencontrer le sensible de la terre et l'extraordinaire du ciel.
L'esprit de l'Orthodoxie réside tout entier dans une initiation à la beauté; celle-ci se réalise dans la vie liturgique. Ainsi, l'église comme bâtiment transfigure l'espace; la liturgie, le temps de la personne et sa vie; les icônes, les yeux; les chants, les oreilles; l'encens, le nez; l'huile, la peau et les organes; et la communion avec le Christ, le corps intime allant jusqu'au corps inconscient dans lequel réside le corps "subconscient" de chacun, que la tradition appelle le "corps glorieux".
Tout ce qui est extraordinaire a pour but de devenir sensible. Tout ce qui est sensible a pour but de devenir extraordinaire. Cela explique bien des choses. Pourquoi la vie liturgique est si belle et si longue à la fois. Pourquoi aussi le recueil de l'enseignement des Pères sur la vie ascétique s'intitule Philocalie "amour de la beauté". Pourquoi, enfin, tout  est si charnel, si délicatement "érotique" du fait d'un éros ineffable, venu d'ailleurs. C'est la raison pour laquelle, en tout cas, la vie du moine n'est pas une fuite, mais une oeuvre qui concerne l'humanité entière.

Pèlerinage au Mont Athos
by Bertrand Vergely, philosophe et théologien, professeur à l'Institut Saint-Serge, Paris

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